Les impacts du Covid-19 sur les comportements de mobilité

La pandémie du Covid-19 a occasionné avec le confinement une restriction inédite des déplacements, ainsi qu’un impact non négligeable sur les comportements d’achat, les voyages, le travail… Certaines évolutions vers la mobilité douce électrique s’en trouvent accélérées.

Acheter / consommer : les modalités de recours au e-commerce confirment une tendance de fond

Sur le court et moyen terme

Après un accroissement des livraisons à domicile observé en début de confinement, cette tendance semble s’être infléchie ensuite. Non seulement la livraison de produits alimentaires, que ce soit aux points relais ou à domicile, stagne, mais les autres formes de livraison décroissent.

Sur le long terme

La tendance de développement du e-commerce observée ces dernières années dans les grandes aires métropolitaines ne semble pas être remise en cause par la crise sanitaire. Rappelons qu’en matière environnementale, la diminution des déplacements individuels des clients est contrebalancée par le foisonnement des livraisons (et des emballages) qui accroît les déplacements de courte distance encore faiblement décarbonnés.

Voyager : l’impact fort sur le tourisme mondial et les déplacements internationaux questionne le modèle aérien

Sur le court et moyen terme

L’arrêt net du tourisme mondial, un des secteurs économiques les plus sévèrement touchés par la situation sanitaire avec la culture, est probablement l’aspect le plus spectaculaire de cette crise sanitaire. Cette crise questionne le développement du marché aérien, dont le modèle semble aujourd’hui à reconsidérer, malgré les incertitudes.

Sur le long terme

Tant que la pandémie ne sera pas endiguée et les frontières rétablies, les échanges mondiaux et le trafic aérien international seront naturellement affectés.

Les opérateurs touristiques se concentreront-ils sur un marché domestique afin de s’adapter à un pouvoir d’achat des ménages en berne et à un coût du transport aérien inévitablement plus élevé ?

Si la pandémie est contrôlée ou disparaît, le tourisme international pourrait reprendre, avec le maintien d’une demande des classes moyennes des pays émergents désirant (re)prendre l’avion pour explorer le monde : c’est notamment le cas de la Chine et de l’Inde.

Du côté des pays occidentaux, la demande jusque-là soutenue, notamment par une clientèle jeune, sera bien sûr dépendante à l’avenir des niveaux de prix offerts et du contexte social comme écologique. L’impact écologique lié à une forte croissance du trafic aérien n’est désormais plus tenable dans le cadre des politiques institutionnelles de neutralité carbone, conduisant inévitablement à un renchérissement des billets d’avion. Ainsi seules les compagnies aériennes les plus solides auront probablement la capacité d’investir dans des avions plus verts (biocarburants durables, motorisations électriques ou hydrogènes), moins consommateurs d’énergie et émetteurs de CO2 – un effort indispensable pour répondre à ce nouveau contexte de transition écologique et désormais exigé par une nouvelle clientèle post Covid-19.

Travailler : va-t-on vers un ancrage des modes de travail à distance lié à la numérisation de la société ?

Sur le court et moyen terme

Diverses enquêtes ont évalué autour de 30 % la part des actifs déclarés en télétravail à temps complet durant le confinement. Les proportions varient de 10 % à 60 % selon les secteurs d’activité.

Les Français confinés apprécient le fait de passer moins de temps dans les transports (62 %),

39 % d’entre eux souhaitent consacrer moins de temps aux déplacements en général et pour 48 % des actifs, moins de temps aux déplacements pour le travail. Avec une éventuelle question sous-jacente : peut-il exister à terme un risque en matière d’emploi lié à une tentation plus grande des entreprises de délocaliser une partie de leurs effectifs supports vers des pays aux coûts salariaux plus bas, contrebalançant la tendance avancée à la relocalisation de certains emplois de production ?

Appuyer l’essor des mobilités douces : la pérennisation des aménagements piétons et vélo

Cette pérennisation en ville comme en milieu rural prend sa pleine valeur avec une politique plus marquée de limitation de la place de la voiture thermique en milieu urbain.

La prise de conscience durant le confinement de l’impact du trafic routier sur la qualité de l’environnement urbain immédiat, aussi bien en termes de pollution de l’air que d’occupation de l’espace public et de niveau sonore, pourrait avoir un double impact positif : d’une part sur l’acceptation par les citadins de la mise en place de zones à faibles émissions instituées par la Loi d’Orientation des Mobilités (LOM) et, d’autre part, sur la demande en matière de moyens de transport plus sobres, à condition que ces derniers soient simultanément plus abordables financièrement et plus pratiques.

Limiter l’usage individuel de la voiture et accélérer le basculement électrique du parc

On peut maîtriser l’impact écologique lié au rebond de l’usage de la voiture en encourageant de nouveaux modes alternatifs (covoiturage) et en accélérant le basculement vers le véhicule électrique.

Si jusqu’à présent les villes étaient les mieux placées pour atteindre dès 2030 une mobilité décartonnée grâce aux nombreuses alternatives à la voiture individuelle, le seul moyen de se déplacer pour une grande partie de la population reste encore aujourd’hui la voiture individuelle, avec une part modale nationale en voyageurs-kilomètres autour de 80 % depuis plus de 25 ans en France.

Les impacts sur le long terme de l’épidémie de Covid-19 dépendront du déploiement plus ou moins rapide d’un traitement ou d’un éventuel vaccin et sur l’évolution à terme de la demande de mobilité et la maîtrise des émissions des gaz à effet de serre. Certains changements de comportement peuvent en effet s’avérer réversibles, le trafic aérien ayant par exemple repris son niveau de 2019 en Chine dès la fin de l’été 2020.

Cet article est inspiré d'une analyse publiée sur le site de France Stratégie.